La grappe d'abeilles ou la couveuse

 

Nous pouvons parler d’anatomie, de morphologie, de système circulatoire lacunaire, de système respiratoire trachéen, de système digestif, de systèmes excréteur et glandulaire, de système nerveux, de thorax, de la tête, de l’abdomen etc… L’abeille domestique n’est pas solitaire, elle appartient à un groupe qui est le super-organisme ou la grappe d’abeilles, sans la grappe l’abeille n’est rien.

L’abeille est un insecte à sang froid vivant dans un corps chaud. Comme d’autres organismes, une abeille produit de la chaleur à l’intérieur de son corps et perd de cette chaleur par la surface de son corps. En formant une grappe les abeilles réduisent leur déperdition de chaleur et maintiennent une température vitale comme le ferait un organisme à sang chaud. En grappe les abeilles sont capables de maintenir une température bien supérieure à la température ambiante, comme le font de gros organismes en quelque sorte.

L’essaim d’abeilles est pour moi comparable à un végétal « grappe de raisin ». Ne dit-on pas d’aller cueillir un essaim, greffer une cellule royale, cultiver des abeilles, tailler une ruche, aller vendanger une ruche « récolte de miel ». L’essaim artificiel aujourd’hui pourrait se comparer à un bouturage. Notons qu’on nomme rejetons les troisième et quatrième essaims.

Je vois l’essaim comme un corps vivant, disons tout simplement que les abeilles sont des cellules de cette grappe, la reine un ovaire de celle-ci, les rayons sont l’ossature de la grappe et on peut considérer le miel comme le gras de la grappe, la ruche est juste l’enveloppe de la grappe qui doit être comparable pour la santé de l’essaim à un bas qui entoure la jambe d’une dame, c’est à dire sans vide.

grappe d'abeilles

Dans tout ce rassemblement il y a une réserve de chaleur située au cœur de la grappe qui d’ailleurs est la couveuse où pond la reine, puis les nourrices maintiennent la chaleur nécessaire à l’élevage des larves. C’est par ces principes et le maintien à une chaleur indispensable que les maladies et les poux se développent le moins. Car à l’intérieur de la grappe nous avons une température de 32°à 37°. En l’absence du couvain elles maintiennent une température inférieure. Cette température à 36° voire 37° ralentit le développement du Varroa, mais maintenant je pense que les plateaux ouverts permettent de baisser la température de la grappe à 33° et cette température est idéale pour le développement du Varroa. A mon avis il faut que le plafond de l’essaim soit directement au contact de la réserve de miel, sans tête de cadres et de barrettes qui laissent passer le froid au-dessus de la grappe et celui-ci descend petit à petit au cœur. Ce refroidissement est très mauvais pour la colonie.

Lorsque l’essaim est situé dans une ruche naturelle et, si l’apiculteur est sage, il récoltera seulement le miel que les abeilles veulent bien lui laisser et seulement au printemps ou encore mieux à la première grosse miellée de manière à laisser le stock de miel prévu par les abeilles en place pour passer l’hiver. En effet le miel récolté pendant l’été sert de source d’énergie pour la production de chaleur car le miel est un composé de sucres simples qui peuvent être rapidement digérés. Ainsi le miel stocké dans la ruche représente une source d’énergie vitale. J’ajoute que si la grappe perd contact avec cette source d’énergie ou si celle-ci vient à manquer la colonie alors est en danger de mort. Nous voyons souvent l’exemple d’une colonie située sur le côté le plus chaud de la ruche où il y avait du miel et si celui-ci a été consommé la grappe ne traverse pas l’hiver la couveuse qui est vide et froide pour aller prélever le miel de l’autre côté et puis meurt. Il faut que les abeilles vivent dans leur miel et c’est pourquoi il est très important que le stock d'automne soit très volumineux car les abeilles doivent en disposer jusqu’au printemps quand l’élevage du couvain a commencé ce qui demande une grande consommation en miel en attendant les premiers prélèvements dans la nature.

Si on étudie un essaim sauvage, il stocke le miel au plafond où il est fixé ainsi que de chaque côté de la colonie. Ce miel qui peut être comparé à du gras de l’animal est tout simplement une nourriture pour la grappe mais aussi et cela est très important un isolant contre le froid ou la chaleur. Car les abeilles fixées à la périphérie et à la base de la grappe sont des ventileuses dont les battements d’ailes repoussent la chaleur en été et le froid en hiver. L’hiver elles se servent de leurs muscles de vol sans se servir des ailes, ce sont les abeilles de la grappe qui produisent de la chaleur car les abeilles de la périphérie jouent un rôle d’isolant et n’ont pas à le faire sur la hauteur de la grappe si l’essaim est fixé au plafond sans barrettes et sans espaces entre la tête des cadres car il n’y a pas de passage d’air. Ceci est important car nous trouvons toujours la chaleur sur la hauteur et non au bas de la grappe et à mon avis il n’est pas nécessaire de réduire le plateau contre le froid car celui-ci rentre quand même par la bouche de la ruche. Hélas les ruches sont presque toutes avec des barrettes et des cadres.

Sur les ruches « les apiculteurs connaissent deux systèmes de ruches : ruches fixes et ruches à cadres, entre ces deux modèles se place un troisième. Il s’agit de la ruche à feuillets, inventée par l’aveugle suisse François Hubert né le 2 juillet 1750 et mort le 22 décembre 1831. » la grappe est directement fixée sur les cadres qui servent de plafond et de corps de ruche et qu’il faut aussi ouvrir pour effectuer les contrôles mais elle a l’avantage pour un apiculteur expérimenté de s’arrêter juste avant la couveuse de manière à ne pas refroidir celle-ci. Nous pouvons faire la comparaison suivante : imaginons qu’un médecin ouvre toutes les semaines le ventre de son patient, on s’apercevrait vite du résultat. Pour la grappe il en est de même et il faut noter que lorsque l’on sort cadre par cadre la colonie d’une ruche il faut vingt heures à la grappe pour revenir à la température nécessaire à la couveuse.

La ruche tronc appelée aussi Brusc permet une tranquillité aux abeilles car il n’est pas possible de l’ouvrir sauf  par le dessus pour extraire le miel au printemps ou encore mieux à la première grosse miellée et par le dessous pour réduire les cires au printemps également de manière à laisser les abeilles reconstruirent leur cire, la grappe est directement située sous la réserve de miel qui sert de plafond « je précise que l’apiculteur doit être absolument écologique, patient, simple et sage et en récoltant savoir laisser une grande part de miel à celles qui l’ont produit, il est certain que les abeilles doivent baigner dans leur miel. »

ruche tronc

La grappe se reproduit par division appelé essaimage mode non sexé de reproduction. Je ne suis pas convaincu qu’il faille détruire les cellules royales toutes les semaines comme on l’apprend aux élèves dans les stages apicoles. Les colonies sont faites pour faire du miel, de la cire, de la propolis, du pollen, de la gelée royale et des essaims. L’apiculteur peut réaliser un essaim artificiel sur des ruches saines, un essaim nu, ou bien laisser faire dame nature car pour cette méthode seules les abeilles ont la responsabilité de séparer la grappe au moment idéal choisi par elles même et elles ont l’avantage de mieux choisir leurs larves destinées à devenir des reines pour l’équilibre de la colonie. Pour ma part je laisse quelques ruches essaimer pour repeupler la nature et si nous voulons sauver les abeilles il faudra bien que les apiculteurs laissent une ou deux ruches pour l’essaimage, d’où l’intérêt d’avoir de plus en plus des apiculteurs de loisirs et je m’efforce de développer la formation des apiculteurs amateurs. Ces essaims sauvages iront repeupler une ruche ou se réfugieront directement dans des endroits qu’ils leur conviennent et assureront leurs rôles de colonisateurs et de pollinisateurs. La première année de l’essaimage l’apiculteur en principe à peu de miel mais il est en possession d’une reine de l’année. L’année suivante il aura sûrement une des meilleures ruches de son rucher. L’apiculteur pourra s’il voit l’essaim partir de la ruche, le récupérer et le reloger dans une nouvelle ruche. Mais je pense que la méthode de contrôler l’essaimage pour le ralentir voire l’arrêter est une énorme erreur car nous allons créer un désordre dans la colonie et de toute façon si celle-ci a la fièvre d’essaimage elle essaimera. Ce procédé nous apprend que l’abeille doit être une très grande colonisatrice et doit le rester comme ses ancêtres car la nature a un besoin essentiel d’avoir de tels phénomènes pour la pollinisation. Ces phénomènes sont naturels et l’être humain comprendra que s’il veut manger dans le futur il est de son intérêt de défendre cette belle leçon de chose que nous donnent les abeilles.

Maurice Rouvière